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L’église Notre-Dame des Essards


À dix kilomètres au milieu des bois et forêts de Langeais se trouve l’ancienne commune des Essards. Le bourg fut à l’origine une clairière au milieu de la forêt, où à l’époque médiévale l’on défricha (ou essarta) le bois. Des croisés compagnons d’armes de Foulques III Nerra, les frères Macquaux, à leur retour de sept ans de captivité des sarrasins, édifièrent en 1022 l’église Notre-Dame des Essards. Avant son rattachement à Langeais, le hameau était une commune rurale de 416 hectares, recouverts pour plus de la moitié de forêts et pour plus d’un dixième de terres agricoles.

L’église rurale Notre-Dame des Essards est inscrite à l’inventaire des Monument Historiques depuis 1926, une procédure de classement Monument Historique étant en cours. L’église Notre-Dame des Essards contient un ensemble de statuaires et chapiteaux gothiques du XIIIème siècle, des vitraux des XIIème et XIIIème siècles parmi les plus vieux et les plus beaux de France, une cloche renaissance de 1505, le tout constituant un ensemble classé Monument Historique, bijou de l’art gothique Plantagenêt.

Contrefort sud-est
Contrefort nord-est
Chaînes
Cloche
Voûtes
Chapiteaux
Chapelle
Contrefort sud-est
Contrefort nord-est
Chaînes
Cloche
Voûtes
Chapiteaux
Chapelle
Plan interactif de l’église Notre-Dame des Essards – liens vers :
1. Contrefort sud-est
2. Contrefort nord-est
3. Les chaînes de captivité des frères Macquaux
4. Cloche Renaissance
5. Clefs de voûte
6. Chapiteaux du couronnement de la Vierge et du Jugement Dernier
7. Chapelle seigneuriale - litre funéraire armoriée

Source : Trait Carré Architectes

Histoire de la construction et de l’entretien de l’église

Nef d’époque romane

L’église Notre-Dame des Essards fondée en 1022 n’a gardé que sa nef romane du XIème siècle, et peut-être la forme de son chevet plat, dans lequel la verrière de la crucifixion prit place dans la première moitié du XIIème siècle dans l’axe de la nef avant d’être vraisemblablement repositionnée dans la lancette nord du chevet au XIIIème siècle.

Chœur et chevet plat gothique Plantagenêt

Au XIIIème siècle un nouveau chœur de style gothique Plantagenêt, remplaçant probablement un chœur roman antérieur, terminé par un chevet plat, fut édifié dans les années 1220 sur le modèle de Saint-Serge d’Angers. Les voûtes et les clés de voûte de l’église Notre-Dame des Essards sont typiques du style gothique Plantagenêt.

Chapelle seigneuriale du XVIème siècle

Au XVIème siècle une chapelle seigneuriale fut ajoutée au sud du chœur, dont la voûte à croisée d’ogives n’a jamais été réalisée ; au niveau du mur occidental de cette chapelle seigneuriale une entrée murée aujourd’hui porte encore la date visible de 1552 sur la pierre du linteau extérieur.
À la même époque, la charpente de la nef fut refaite en voûte lambrissée.

Abandon post révolutionnaire et sauvetage au XIXème siècle

La commune des Essards ne fut jamais ni populeuse ni riche au cours des siècles mais elle fut toujours sensible à son église ; vraisemblablement seuls des seigneurs et les archevêques sont intervenus pour sauvegarder et embellir l’église Notre-Dame des Essards au cours des siècles.
Ainsi le 17 mai 1757, à l’issue de sa visite aux Essards, une ordonnance fut donnée au château de Rochecotte par l’archevêque de Tours Henry Bernardin de Rosset de Fleury, conseiller du Roy par la grâce de Dieu et de l’autorité du Saint Siège apostolique ; l’ordonnance fut lue au prône pendant trois dimanches consécutifs et retranscrite sur un des registres de la paroisse : « le tabernacle sera redoré, le gradin du maistre autel sera peint, on éloignera un peu les fonds baptismaux qui fermeront la nef, on remettra quelques carreaux qui manquent à l’église, on réparera les laizardes, on mettra l’armoire des ornements dans un endroit moins humide…. Et on mettra une croix au milieu du cimetière quand les travaux seront achevés ».
À partir de la période révolutionnaire l’église ne fut plus entretenue ; les désordres s’aggravèrent, les seigneurs et les évêques ne furent plus présents pour entretenir l’église et les puissances modernes prirent le relais.
En 1831, la commune entreprit quelques travaux.
Le maire M. Lemesle fit construire en 1839 par les entrepreneurs René Barbet et Landry trois éperons en contrefort afin de consolider l’édifice, pour la somme de 663 francs. Quelques petits budgets additionnels furent affectés à de menus travaux par la commune : en 1853, la somme de 70 francs, en 1856 les sommes de 200 francs et de 400 francs.
En 1868, la toiture nord de la flèche du clocher fut réparée.
À partir de 1876, un nouvel architecte chinonais, M. Noël Daviau, fut retenu pour la restauration de l’église Notre-Dame des Essards.
Une avance de fonds de 1 500 francs permit à la commune de lancer des travaux sans attendre qu’une souscription parmi les habitants de la commune d’un emprunt d’une somme équivalente fut achevée.
M. Noël Daviau entreprit le cintrage des voûtains ouest, les travaux des ogives et de l’arc doubleau.
La restauration et le grattage des voûtes du chœur furent réalisée, et, vraisemblablement la plupart des dais et clés de voûte fut recouverte des nouvelles peintures polychromes.
Un dallage en carreaux blancs de terre cuite de Langeais fut mis en place.
Aux travaux de maçonnerie achevés en 1877, succédèrent les travaux de restauration des vitraux menés par l’atelier Lobin de Tours.
En 1880, face au risque d’écroulement de la façade ouest du clocher, un étaiement fut mis en place. Après approbation des plans en 1884, lors les travaux effectués en 1885, des travaux complémentaires furent réalisés sur la galerie et au niveau des soubassements. La commune des Essards participa à ces travaux pour la somme de 2 180 francs en 1885.

Travaux réalisés au XXème siècle

Quelques rares travaux d’entretien courant furent réalisés au XXème siècle :
- En 1954, la toiture et le clocher furent restaurés grâce à un don de 100 000 francs réalisé par Louise Binet ou par sa fille Annie qui appartiennent à la famille Lefèvre-Utile (famille à l’origine des biscuits Lefèvre-Utile, c’est-à-dire LU), propriétaire du château de la Motte. La verrière de la chapelle fut remplacée par un vitrail en verres blancs à motif de losange.
- Sous la conduite de M. Michel Henry de nouveaux travaux de réfection furent entrepris sur la toiture en 1988.

Situation au XXIème siècle

L’église Notre-Dame nécessite une nouvelle fois une campagne de restauration intérieure et extérieure afin d’être sauvée, M. Thierry Guittot de Trait Carré Architectes ayant été retenu pour superviser et prioriser la campagne de restauration depuis 2015.
Cette lourde campagne de restauration va débuter par une étude picturale des peintures polychromes.

Architecture extérieure de l’église Notre-Dame

Porche occidental beffroi et clocher

La façade occidentale reconstruite au XIXème siècle est constituée d’un mur pignon couronné d’un clocher recouvert intégralement d’ardoises.
S’appuyant sur le mur pignon occidental, le petit beffroi et la flèche octogonale du clocher sont intégralement recouverts d’ardoises, sans laisser aujourd’hui d’ouvertures avec abat-son.
Au pied du clocher, le porche est protégé par un auvent à usage de caquetoire communiquant au nord avec le cimetière. La porte occidentale actuelle est un porche gothique en forme d’arc brisé du XIIIème siècle entouré par deux voussures gothiques.
La porte est surmontée par une baie moderne en arc plein cintre surmontée d’un cordon.
Le chanfrein de la première voussure juste au-dessus de la porte, en légère surépaisseur comporte des motifs de fleurs de rosaces ; deux têtes sculptées de personnages grotesques encadrent la porte.
Ci-dessous des agrandissements de quelques motifs de la frise, avec la représentation de têtes grotesques très émaciées de personnages barbus et moustachus, pareils à des diables ; ainsi que du second cordon au motif de dents de scie s’arrêtant à mi-hauteur qui surmonte la première voussure.

Nef du XIème siècle

Façade méridionale

Les murs gouttereaux sud de la nef sont montés en pierres de tout-venant (moellons) recouvertes d’un crépi ocre beige au XIXème.
Le mur gouttereau sud de la nef est percé de deux fenêtres et d’une entrée latérale méridionale, entourées de pierres de taille de moyen appareil ; les chaînes d’angle sont également en pierres de taille.
Les petites fenêtres romanes de la nef ont été agrandies au XIXème siècle et remplacées par les fenêtres actuelles de grande dimension constituées d’un arc en plein cintre.
La porte méridionale constituée d’un arc en plein cintre est surmontée d’un tympan qui comporte l’inscription AVE MA (pour AVE MARIA) entourant une croix, des flammes et trois clous.
Une lignée de quelques trous de boulins est encore visible dans la partie supérieure de la façade, au sommet de laquelle court une corniche du XIXème siècle réalisée en tuffeau de Parçay.

Façade septentrionale

La nef et le chœur comportent des murs gouttereaux de hauteur identique, mais d’appareillages différents.
Le mur gouttereau de la nef du XIème siècle de la façade nord est bâti en pierres de tout-venant recouvertes d’un enduit plus rose que le crépi ultérieur très gris. Les moellons utilisés sont d’une très grande dureté, de type silex.

Seule une petite ouverture romane du XIème siècle au niveau du contrefort à la jonction du chœur est visible de l’intérieur – elle est murée aujourd’hui.
De la construction de la nef au XIème siècle, seule subsiste au milieu du mur une petite baie romane à arc en plein cintre. En partie haute du mur est percée une ligne de trous de boulin.
La seconde partie du mur dans l’alignement de la nef du XIème siècle correspond au mur du chœur et du chevet plat du XIIIème siècle ; l’ensemble de la façade est réalisé en pierres de taille de moyen appareil très blanches, épaulé par quatre contreforts surmontés d’un chaperon. Les deux contreforts centraux, construits dans le même matériau, furent rajoutés au XIXème pour contrecarrer les poussées du doubleau et de la voûte du chœur.
Deux ouvertures du XIIIème siècle, circonscrites par un cordon mouluré.
Une frise en dents de scie en haut du mur au niveau de la toiture souligne la corniche.

Chapelle seigneuriale du XVIème siècle

Au XVIème siècle, une chapelle seigneuriale fut construite en moyen appareil, percée de deux ouvertures et épaulée à l’angle des murs sud et ouest par un contrefort en moyen appareil, dont les chaperons recouverts de tuile plate.
Trois lignées de trous de boulin sont encore visibles sur le mur pignon sud.
Le versant ouest du mur pignon est surmonté d’un rondelis1, tandis que le versant est du mur pignon est directement recouvert par la toiture d’ardoises à forte pente.
Sous la baie du mur ouest de la chapelle, est encore visible le sommet de l’arc en plein cintre de la porte basse de la chapelle seigneuriale, porte aujourd’hui murée.
La blancheur des pierres modernes ayant servi à murer la porte et le bas du mur ressort nettement sous les pierres au ton jaunâtre des murs supérieurs.
Au sommet de l’arc surbaissé, un cartouche porte la date de 1552, juste sous l’ancienne corniche moulurée de la porte aujourd’hui murée ; deux consoles supportent cette corniche.

Le chœur et le chevet plat du XIIIème siècle

Le chœur et le chevet plat construits en moyen appareil à joints rubanés sont surmontés d’une corniche soulignée par une frise en dents de scie à leur sommet ; le chevet plat s’appuie sur deux contreforts à l’extrémité de la butte de terrain qui surplombe le village des Essards et la vallée de la Roumer.
Un arc-boutant au sud-est contrebute la poussée du chevet et l’achemine vers le contrefort couronné d’un sobre pinacle, la construction étant en pierres de taille de moyen appareil y compris pour le chaperon ; seul le rampant de l’arc-boutant est recouvert de tuile plate.
La sacristie du XIXème siècle s’appuie sur la façade sud du chœur et sur le mur est de la chapelle seigneuriale.
Le second contrefort au nord-est directement adossé au chevet, décollé de la façade aujourd’hui ne retient plus qu’une partie de la poussée exercée par le chœur de l’église. Sa maçonnerie est un appareillage de pierres de tout venant, silex de couleur rougeâtre en provenance probablement des terres argileuses environnantes. Son chaperon est également en pierre.


Chaînes de captivité de retour de pèlerinage

Les chaînes de prisonnier scellées dans le mur nord du chœur sont celles des chevaliers Macquel ou Macquaux, lors de leur emprisonnement par les sarrasins en Palestine. À leur retour après leur libération, les chevaliers Macquaux fondèrent l’église Notre-Dame des Essards en 1022.

Cloche Renaissance de 1505

L’unique cloche de l’église Notre-Dame des Essards, qui sonne chaque jour les heures, date de 1505. Il s’agit d’une petite cloche de moins de quatre-vingt-dix kilogrammes, de dimensions de l’ordre de 53 centimètres par 56 centimètres, dont la note est le mi 4.
Cloche, joug et battant furent inscrits aux Monuments Historiques le 8 janvier 2021.
Isabelle Girard décrit de la manière suivante la cloche Renaissance des Essards : La cloche est accrochée à son joug (mouton) par l’intermédiaire de ferrures grâce à quatre anses transversales et deux anses axiales décorées de visage disposées en couronne. La cloche porte à son cerveau un court texte réparti sur deux lignes : ligne 1 «  LAN MIL CCCCC (E) V PAR (motif cloche) ESTIENE GEL.M.. (mot effacé, une lettre A ) (mot effacé, une lettre N) (mot effacé une lettre A) MONT » ; ligne 2 « FAIT NOMER RENE DELAGOCAIS (E) CUTEAU FURAN(T) P(ARRAINS effacé)  ».
Sur la robe de la cloche sont présents deux cartouches, l’un représentant une Vierge à l’enfant, le second cartouche en très mauvais état n’est pas lisible ; des fleurs de lys isolées sont disposées sur le pourtour à équidistance des cartouches.

Les clés de voûte du chœur Plantagenêt

La clé de voûte située au niveau du premier arc en plein cintre représente une double scène : la scène dressée vers les fidèles pourrait représenter le Christ les mains jointes en prière, couronné et peu vêtu et entouré de deux anges ; la scène tournée vers le chevet la Vierge en prière les mains jointes, Vierge couronnée et vêtue d’une robe bleue aux pli très longilignes et entourée de deux anges.
Les attitudes des deux anges qui entourent le personnage central diffèrent très légèrement, seules les positions des mains sont soit vers le bas, soit à l’horizontal.
Au niveau de la première travée du chœur, la clé de voûte principale à la jonction des nervures représente la scène du « sein d’Abraham » qui est pour les juifs la demeure des Justes après la mort et jusqu’à la résurrection.
Abraham le vieillard patriarche tient dans ses bras deux Justes représentés par deux jeunes enfants. Cette figuration du « sein d’Abraham » prolifère en Occident, principalement aux XIIème et XIIIème siècles, comme image du paradis céleste.
Au sommet du chœur la clé de voûte centrale de la deuxième travée représente le Christ en majesté qui domine les autres clés de voûte sculptées figurant différentes scènes.
Les clés de voûte à la jonction des liernes et des tiercerons représentent des anges sonnant le jugement dernier ; en-dessous à la jonction des tiercerons et des ogives des baies, les clés de voûte représentent des anges avec les instruments de la passion2.
Le Christ nimbé en prière tient ses mains levées vers le ciel, dans lesquelles on aperçoit les trous des clous de sa crucifixion. Seule l’épaule gauche est recouverte d’un drapé.
Au niveau supérieur à la jonction des liernes et des tiercerons, les clés de voûte (médaillons) représentent des anges sonnant le jugement dernier, prenant appui sur un personnage en prière.
Les poses des anges et du personnage en prière diffèrent très légèrement d’un médaillon à l’autre.
L’ange à gauche est l’ange Raphaël qui est chargé de souffler trois fois dans une trompe en guise d’annonce de la résurrection ; l’ange à droite tient le livre des bonnes actions, il porte un instrument de musique qui est une busine.
Les deux anges dans cette clé de voûte jouent du même instrument de musique, une trompe.
Au niveau inférieur à la jonction des ogives des baies et des tiercerons, les clés de voûte représentent des anges tenant différents instruments de la passion, la croix, la couronne d’épines, une lance et une torche ; ils foulent de leurs pieds une feuille stylisée de nénuphar ou de trèfle.
Au-dessus du Christ de chœur, à la croisée de l’ogive un médaillon pourrait représenter une scène de luxure, la femme une main sur son sexe et la seconde main cachant sa poitrine – ce pourrait éventuellement être Ève après la pomme.

Chapiteaux du jugement dernier et du couronnement de la Vierge

Deux chapiteaux polychromes se font face à la jonction de la nef et du chœur, sur le mur nord le jugement dernier et sur le mur sud le couronnement de la Vierge.

Chapiteau du couronnement de la Vierge du XIIIème siècle

La « Couronne de Marie » est mentionnée dès le VIème siècle comme corona virginum, mais ce n’est qu’à partir du XIIème et XIIIème siècle que la représentation du Couronnement de la Vierge devint populaire.
L’église Notre-Dame des Essards est ainsi ornée d’un magnifique chapiteau polychrome sculpté en bas-relief d’une façon très naïve qui représente le couronnement de la Vierge, son point culminant après l’assomption de son âme et de son corps.
La scène située au centre au niveau de la colonne torique centrale dans sa partie basse, sculptée en bas-relief dans une croix trèfle, représente la Vierge et le Christ assis l’un à côté de l’autre3. Le Christ est représenté d’une manière inhabituelle aujourd’hui, jeune, imberbe, la chevelure longue, l’allure efféminée. Il tient le livre de la Bonne Nouvelle (c’est-à-dire la Bible) dans sa main gauche et pose avec sa main droite la couronne sur la tête penchée de la Vierge, dont les mains sont ouvertes en position d’orante.
La scène du couronnement est entourée de nombreux anges et de personnages représentants des saints qui sont répartis dans des petits cartouches.
Dans l’entourage immédiat de la Vierge et du Christ deux anges agitent chacun un encensoir.
Dans un léger renfoncement, deux personnages couverts d’un bonnet médiéval tiennent chacun le livre de la Bonne Nouvelle ; l’un est sous un arc plein cintre, l’autre sous une arche en forme de trèfle. La scène du couronnement est surmontée d’un tailloir comportant au centre trois anges assis ; à gauche un personnage recouvert d’un bonnet médiéval tient un livre, la scène de droite est absente.
La scène latérale gauche en retour représente au niveau inférieur un roi, les cheveux courts, assis sur son trône tenant un sceptre dans sa main droite et bénissant de sa main gauche ; une reine couverte d’un bonnet, absorbée par la lecture de la Bonne Nouvelle.

Au niveau supérieur, deux anges, l’un agenouillé au visage et à la coiffure féminine, le second assis au visage masculin, la tête tonsurée.
La scène latérale droite en retour représente au niveau inférieur un évêque assis sur son trône tenant une crosse dans sa dextre et le livre de la Bonne Nouvelle dans sa senestre ; au niveau supérieur, un ange assis sur un banc, les deux autres panneaux de retour sont absents.


Chapiteau du jugement dernier du XIIIème siècle

Le chapiteau du jugement dernier est un thème qui apparut dès la fin du XIème siècle dans les sculptures des tympans des églises et des cathédrales. Ce thème fut très en vogue au XIIIème.
Le chapiteau du jugement dernier des Essards décrit beaucoup plus de scènes d’enfer que de scènes du paradis, montre beaucoup plus de damnés brûlés, étranglés, embrochés que de bienheureux ; par rapport à la représentation habituelle de ce thème dans les églises de la même époque, sont absents de ce chapiteau les figures des bienheureux couronnés, les anges sonnant de la trompette, la Vierge et Saint Jean Baptiste intercédant pour sauver les humains.
Les sculpteurs ont adopté un parti pris iconographique, distinguant les âmes justes des âmes damnées.
Dix scènes constituent le chapiteau de Notre-Dame des Essards.
La scène centrale du niveau inférieur représente des flammes rouges chauffant une marmite bouillante portée par un trépied, dans laquelle une dizaine d’hommes des deux sexes cuisent entourés par deux démons fantastiques, celui de gauche vêtu d’un pagne, une tête à la mâchoire disproportionnée, celui de droite jetant dans la marmite un homme allongé sur son dos.
Les personnages sont tous représentés âgés d’une trentaine d’années, l’âge parfait à cette époque ; nul vieillard ni enfant n’est figuré dans cette sculpture.

À droite une scène représente l’archange Saint Michel qui pèse avec une balance à fléau les mérites des âmes qui se répartissent en deux groupes, les élues et les réprouvées. Un seul humain est visible à gauche, il s’agit d’un petit enfant, symbole de l’âme.

À gauche de la scène centrale, une scène représente les âmes élues4 : un homme nu portant sur ses épaules un second homme, les deux s’échappant de l’enfer; à leur gauche une femme nue attrapée aux seins par des crapauds symbolisant des démons, qui cherchent à la faire tomber en enfer.


Les deux panneaux latéraux inférieurs droits en retour encadrent la pesée des âmes.

Le premier panneau du niveau inférieur semble représenter le paradis.
Une colonne représente un arbre surmonté de feuillages palmés entouré de deux adultes et d’un enfant  qui regardent tous le ciel ; l’un des adultes habillé de braies semble cracher des animaux en l’air, le second tout nu semble avoir les mains enchaînées, l’enfant est dans une position de garde à vous, le bras allongé le long de son corps.












Le second panneau du niveau inférieur semble représenter la résurrection des corps.
Un homme est alité sous une arcade en trèfle, le corps incliné, légèrement assis – à cette époque les gens ne dormaient pas allongés à plat, par peur la mort – le personnage semble entouré de bandelettes de linceul desserrées. Cette scène symbolise la résurrection des morts. Toutefois, le repeint en couleur verte des bandelettes n’est pas approprié à cette scène.







Les deux panneaux latéraux inférieurs gauche en retour présentent deux scènes difficiles à déchiffrer.

La scène latérale gauche en retour représente quelques personnages grotesques, l’un semblant avoir une tête de monstre à trois jambes, et un autre une seule jambe.
La scène centrale du niveau supérieur du tailloir représente deux diables ou démons, l’un en pagne, le second tout nu, qui conduisent enchaînés neuf humains vers l’enfer.
Les personnages d’âge mûr plutôt bedonnants sont tous vêtus d’une longue tunique, certains portant des couvre-chefs, les autres à la chevelure courte, l’un portant une barbe courte bouclée, un autre tenant une bourse pleine à deux mains. Leurs vêtements aux beaux drapés représentent les puissants et les rois qui vont être conduits en enfer.
La scène latérale gauche en retour au niveau supérieur représente à gauche un personnage fantastique qui fait tourner un corps humain sur une broche au-dessus des flammes de l’enfer, et à droite un monstre à l’allure d’un crocodile dévorant dans sa gueule plusieurs hommes.

La scène latérale droite en retour au niveau supérieur représente des hommes nus prenant la fuite, à moins qu’ils ne sortent de leurs tombes.
Un diable grotesque portant des bottes montantes jusqu’aux cuisses, mais à l’envers, semble vouloir détacher un pendu – ou un décapité – dont la tête horizontale est perpendiculaire à son corps et dont les mains sont enchaînées ; un autre semble avoir la tête en bas et les jambes en l’air, accroché par les pieds.

Litre funéraire armoriée de la chapelle seigneuriale

Les murs de la chapelle seigneuriale sont encore recouverts à mi-hauteur d’une litre seigneuriale armoriée, sous laquelle deux inscriptions figurent.
La première, de couleur noire, est très effacée.
La seconde, de couleur ocre, laisse voir, en-dessous de l’inscription précédente : « S-ROC ».


1 Un rondelis est un bourrelet de pierre dépassant de la toiture au sommet du mur pignon.
2 Les liernes vont de la clé de voûte centrale jusqu’aux médaillons, les tiercerons rejoignent les piliers. Le terme de lierne désigne deux nervures qui viennent s’ajouter aux ogives d’une voûte quadripartite. Les liernes se croisent orthogonalement à la clef de voûte et relient celle-ci entre d’une part le sommet des arcs doubleaux qui séparent chaque travée de voûte et d’autre part le sommet des arcs formerets placés à la retombée des voûtains, ou quartiers de voûtes, sur les murs latéraux de l’édifice. L’utilisation des liernes seules aboutit à la voûte d’ogives octopartite. Les liernes se combinent très souvent avec les tiercerons, nervures plus courtes qui joignent les liernes aux quatre angles de la voûte. Les tiercerons rencontrent des liernes à la moitié ou au tiers (d’où leur nom) de la longueur de ces dernières. La combinaison des ogives, des liernes et des tiercerons caractérise les voûtes en forme d’étoile qu’affectionne l’architecture flamboyante.
3 D’après Émile Mâle, dans son ouvrage en 1899 « L’Art religieux du XIIIème siècle en France », le Couronnement de la Vierge se présente dans la sculpture gothique du XIIIème siècle sous trois aspects : Vierge déjà couronnée, Vierge couronnée par un ange, Vierge couronnée par le Christ.
4 D’autres voient au contraire dans cette scène la représentation de la luxure.